Le sourire de Martina

Traduit par Bernard Tornare La première fois qu’Arnold l’a frappée, c’était la première nuit où ils ont dormi ensemble. Martina s’est enfuie avec lui parce que sa famille voulait l’envoyer vivre chez sa tante Dominga dans la capitale, pour se débarrasser du fainéant qui lui tournait autour, comme son père appelait Arnold, «le fainéant qui n’a pas de boulot».  Sa mère, qui avait grandi en gardant les vaches et en cuisinant des gâteaux pour toute la famille et qui, lorsqu’elle s’est mariée, a exercé le même métier. Elle lui a dit qu’elle ne devrait pas se marier pas avant d’avoir obtenu un…

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Le chemin de Victorina 

Traduit par Bernard Tornare Lorsque Victorina accepte, elle est déjà juchée sur une chambre à air qui traverse les eaux du Rio Grande, les cris des autres migrants la ramènent à la raison. Quelle heure était-il ? Peut-être était-il 1 ou 2 heures du matin, mais comment savoir si le ciel était couvert, peut-être était-il vers 3 heures du matin, l’heure où les coqs chantent dans son Honduras natal. Ni le froid de l’époque, ni l’eau glacée n’ont étourdi ses sens autant que le choc de voir tant de familles terrifiées, ne sachant pas nager, essayer de traverser la rivière. Il…

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Au petit matin sur le verglas

Traduit par Bernard Tornare Ce jour-là, elle a nettoyé deux maisons. La dernière a pris plus de temps que d’habitude parce que ses employeurs iraniens fêtaient Noël, un Noël retardé qu’ils célèbrent le 7 janvier dans le calendrier julien, comme le lui a expliqué la propriétaire de la maison à de nombreuses reprises lorsque, au milieu de la vaisselle, elle est apparue pour lui raconter des histoires sur son pays et ses ancêtres. Tomasina la laisse toujours parler sans cesser de passer la serpillière, elle comprend à peine l’anglais.  Lorsqu’elle est arrivée, elle a trouvé la maison sens dessus dessous. Bien…

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De moins en moins

Traduit par Bernard Tornare Ce texte fait partie de la série Las insurrectas (Les insurgés). Les seules fois où Caya de nía Chenta entendait le bruit des sabots des chevaux sur les pavés, c’était la nuit, lorsqu’elle tenait compagnie à la dame de la pharmacie ; lorsque ses enfants partaient en voyage à la capitale, elle demandait à nía Chenta de lui prêter la maison pour pouvoir dormir avec elle pendant leur retour. C’est ainsi que Caya entendit le bruit de l’eau potable qui coulait dans les tuyaux en PVC, et dans cette maison, elle vit aussi pour la première fois…

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Une carambole fraîche

Traduit par Bernard Tornare Les premières années, Filomena écrivait en espagnol dans un carnet et utilisait un traducteur anglais-espagnol pour rédiger la liste des courses, toutes pour de la nourriture casher. Dans sa ville natale de Sibaná, El Asintal, Retalhuleu, au Guatemala, elle n’avait jamais entendu parler de la religion juive. Et encore moins de la nourriture casher. C’est à Chicago, lors de son premier emploi, qu’elle a découvert ce monde étrange constitué d’aliments et de rituels.  Au début, on aurait dit des trucs de gringos, comme les évangélistes avec leurs haut-parleurs qui diffusent dans son village les dimanches de culte et…

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Un brin de menthe

Traduit par Bernard Tornare À onze heures et trente du matin, Jacinta sentit l’odeur de la menthe fraîche après la pluie et celle des brins de coriandre fraîchement coupés, enveloppés dans une omelette fraîchement sortie du comal. La sensation du jus de tomate coulant sur les coins des lèvres lui fit encore plus regretter sa natale Olopa, Chiquimula au Guatemala, ainsi que les années de son enfance où la famille était réunie. C’est une journée chaude de début mai, chose rare, car l’été arrive en juin avec sa canicule et ses pluies torrentielles. La chaleur lui fait remonter le temps et…

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Du lever au coucher du soleil

Traduit par Bernard Tornare Francisco a la chance de travailler du lundi au dimanche, quel que soit le temps. C’est ce qu’il dit à sa mère dans sa ville natale de Morazán, au Salvador, chaque fois qu’il l’appelle au téléphone. Le travail est dur, mais il n’est pas si différent d’une journée passée dans les champs de son pays natal, où il a grandi en labourant la terre avec un attelage de bœufs. Lorsqu’on lui a dit de partir pour le Nord, il n’y a pas réfléchi à deux fois. Cela fait trente ans maintenant. Il a quitté les collines…

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