Pandémie de cynisme

Traduction Bernard Tornare, blog Hugo Chávez

Nous ne voulons voir aucune injustice, non pas parce que cela nous fait mal, mais parce que nous nous moquons de la douleur des autres et de ce qu’ils vivent. Et si on nous croise en chemin, on change de côté, on recule ou on saute dessus comme si c’était une flaque d’eau, alors on est bon pour esquiver. Historiquement, nous avons évité la mémoire et la reconstruction du tissu social. Il n’y a pas de virus aussi fulgurant que celui du cynisme et là nous nous peignons en tant qu’humanité. Les virus vont et viennent, la façon dont les médias et les gouvernements traitent l’information est ce qui fait l’énorme différence. 

Par exemple, la dengue, les pays en développement sont inondés et des millions de personnes meurent et continueront de mourir, vous ne voyez pas les gouvernements ou les médias mettre en place des feux rouges d’urgence. L’avortement clandestin, des millions de femmes meurent et il n’y a pas d’urgence mondiale pour une loi sur l’avortement légal, sûr et gratuit. L’extrême pauvreté, la calamité de notre double standard mondial. Sur ce point, je ne veux pas sous-estimer l’importance du virus que nous connaissons actuellement en tant que population mondiale et je ne dis pas que nous ne devons pas suivre les indications. Mais la grande masse des travailleurs du monde entier ne peut pas rester chez elle en quarantaine car ils survivent à peine au jour le jour et dans leur travail, leurs patrons oligarchiques ne leur donneront pas non plus les jours à manquer.

Qui couvrira les cultures saisonnières ? Si ce sont les travailleurs agricoles mal payés et sans droits du travail qui le font, ils ne sont pas considérés comme des personnes et ils ne seront pas non plus dans cette crise. Il est agréable de voir des gens chanter et jouer des instruments sur les balcons des immeubles en Italie dans un spectacle de culture et d’unité, dans une certaine mesure disons d’humanisme, mais pourquoi ne se sont-ils jamais unis ainsi pour exiger du gouvernement de ce pays un traitement digne des migrants sans papiers qui arrivent noyés dans la mer ? Que se passerait-il si toutes les familles en Italie sortaient sur les balcons en faisant preuve d’humanisme et en chantant, en jouant d’instruments exigeant un traitement humain et la légalité du séjour et des droits du travail pour les migrants qui arrivent noyés dans des bateaux en provenance d’Afrique et d’une partie de l’Europe ? Une quarantaine demandant des sans-papiers, quel luxe. Mais ils n’ont pas d’importance, ils n’ont pas eu d’importance et n’en auront pas.

Ceux qui ont pu le faire parce qu’ils ont eu le temps et l’économie, les jours précédents ils ont vidé les supermarchés, en fin de compte il y a encore les travailleurs qui suivent leurs dépenses, beaucoup n’ont pas pu aller acheter quoi que ce soit parce qu’il n’y a pas d’argent, quand ils arrivent ils ne trouveront rien parce que ceux qui pouvaient ont tout accaparé sans se soucier des autres. C’est un signe évident d’égoïsme. Cette pénurie massive car elle a été mondiale, à mesure que la pandémie progresse dans des secteurs comme celui-ci, les supermarchés se vident. Cela nous donne une idée, minime, mais qui nous donne une idée de la façon dont les pays scandalisés ont vécu à l’époque des dictatures et des invasions, qui ont commencé par la destruction de supermarchés, de boulangeries, de pharmacies, pour créer le chaos dans les populations. Nous n’y sommes pas allés depuis une semaine et tout est propre, les produits de base balayés. Imaginez des années de dictature où les gens étaient violés, torturés, disparus et assassinés. Pourrions-nous survivre à quelque chose comme ça ? Je parle de ces nouvelles générations pompeuses et arrogantes. Parce que les plus anciens, nous savons de quoi ils sont faits, sont notre exemple et notre guide.

On peut donc imaginer ce que signifie un blocus économique dans des pays comme Cuba et le Venezuela. Cuba, avec des décennies comme celle-ci et pourtant elle continue à être un exemple d’humanisme pour le monde, fournissant actuellement des médicaments et envoyant ses médecins dans le monde entier pour répondre aux besoins de la population. Et Fidel n’a pas enseigné cela, ce sont ses hommes qui ont su résister avec dignité et conscience à l’énorme injustice que le monde a commise avec son cynisme et son silence. 

On peut alors imaginer ce que vit la Palestine, (ce que l’Irak, le Pakistan et la Syrie ont vécu) avec le bombardement d’hôpitaux, de maisons et d’écoles. Leurs oliviers sont déracinés à l’aide de machines lourdes, leurs cultures sont pulvérisées pour qu’elles ne poussent pas. Ils sont bombardés dans les supermarchés, on leur tire dessus et leurs vêtements sont brûlés s’ils s’approchent du mur qui leur vole leur terre jour après jour. Bien sûr, nous pouvons l’imaginer, mais nous préférons changer de l’autre côté de la route, car leur douleur, leurs appels au secours et la dignité de ces personnes qui luttent nous crachent au visage, dans notre cynisme. Bien sûr, nous vivons une pandémie et l’avons toujours vécue, mais avec cynisme, insensibilité et deux poids deux mesures.

Espérons au moins que, comme on ne nous donne pas le courage de regarder ailleurs au-delà des frontières patriotiques, ni que nous osons entrer dans la mémoire historique de notre propre peuple pour penser à la terre brûlée et aux populations qui se sont exilées de force, nous exigeons que rester à la maison pour garder la quarantaine soit pour chaque être humain, et pas seulement pour ceux qui se balancent sur leur privilège de classe, et de là, pour signaler le comportement des travailleurs en temps de cynisme pandémique. 

Ilka Oliva Corado @ilkaolivacorado

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